19 Mai 2022
SOINS PALLIATIFS :
DES SOIGNANTS REFUSENT D’APPLIQUER LA LOI :
pas de sédation terminale sauf quelques heures avant la mort ! lorsque c'est déjà trop tard...
C’est une question délicate qui ressurgit en cette présidentielle, celle de l’euthanasie et des soins palliatifs.
La loi actuelle, qui refuse toute aide active à mourir, mais propose une sédation profonde pour éviter les souffrances de l’agonie, n’est souvent même pas appliquée.
En raison notamment du refus de certains médecins, et de l’influence d’une société savante de soins palliatifs, trustée en partie par des cathos-tradis.
Plusieurs candidats de gauche, Anne Hidalgo (PS), Yannick Jadot (EELV) et Jean-Luc Mélenchon (LFI) se sont engagés à modifier la loi actuelle.
Emmanuel Macron ne se mouille pas, et propose une « convention citoyenne » pour trancher ce débat.
La SFAP (association d'accompagnement de soins palliatifs) est déjà dans les startings block pour y participer, et peser de tout son poids. « Nous y porterons la voix des soignants », annonce Claire Fourcade. Quid de celle des patients ? ●
L’association « Le Choix, citoyens pour une mort choisie », s’est mobilisée via une manif samedi 2 avril 2022 ;
Elle va bientôt publier un recueil de témoignages :
« Le livre noir de la mort en France », * NB le titre définitif reste à définir
tous plus révoltants les uns que les autres et montrant combien la loi Claeys-Leonetti n’est pas appliquée, mais aussi qu’elle est insuffisante.
Que dit cette loi ? Elle vise à proposer des droits pour la fin de vie mais toujours en évitant une aide active à mourir.
Une première version de 2005 proposait le « laisser mourir », c’est à-dire que le patient soit débranché de toute aide médicale (ni nourriture ni hydratation), au risque de mourir tout simplement de faim et de soif et de devenir un squelette.
La loi a été révisée en 2016, pour insister sur la possibilité d’« une sédation profonde et continue » jusqu’au décès, pour les patients atteints d’une affection grave, et dont le pronostic vital est engagé à court terme.
Elle a donné aussi plus de poids aux directives anticipées.
Mais elle laisse toujours la décision de la fin de la vie à l'équipe médicale (qui n'a rien d'un collège en Justice) et pas au patient.
La sédation terminale prévue par la loi n’est pas souvent administrée, ou de manière extrêmement faible, et au tout dernier moment de l'agonie, des médecins étant réfractaires à un geste qui à leurs yeux pourrait accélérer la mort du patient.
Au moment du vote de la loi, les tradi-catho d’Alliance Vita avaient d’ailleurs dénoncé ce qu’ils estimaient être une « euthanasie masquée ».
Au-delà de l’application ou non de la sédation profonde, la loi telle qu’elle existe aujourd’hui ne répond pas à tous les cas.
Enquête. Exclu Web, Source : « Charlie-Hebdo » Laure Daussy – 07.04.22
Témoignages :
Alors que le sociologue Charles Condamines est à l’agonie, le médecin des soins palliatif est revenu sur sa décision d’une sédation profonde pourtant actée collégialement, sans explication.
Élisabeth Condamines, son épouse, a beau les implorer par téléphone, ils répondent : « Soulager plus, ce ne serait pas éthique ! ».
« Il est parti en s’étouffant », nous raconte-t-elle encore bouleversée et révoltée, un an après.
Pire, on lui dit ensuite : « On pensait que vous exagériez ses souffrances. »
Christine Pedotti, directrice de Témoignage Chrétien (trimestriel des cathos de gauche), nous confie aussi, qu’à la mort de sa mère, à l’hôpital, on refusait de lui administrer plus de morphine.
« J’ai réalisé combien, dans les équipes de soignants, prévaut une culture de la naturalité de la fin de vie, un peu comme l’accouchement qui devrait se passer dans la douleur. »
ANNE BERT : " Je ne comprends pas qu'on invite des évêques pour débattre de l'euthanasie "
Atteinte de la maladie de Charcot, l’écrivaine Anne Bert, que nous avons interviewée dans le journal, se voyait enfermée peu à peu dans son propre corps, dans une longue torture où elle perdait toutes ses fonctions corporelles, mais sans pour autant être en phase terminale pour que la loi puisse s’appliquer.
Elle avait reçu des courriers d’ultra catho lui disant qu’elle avait de la chance : c’était Dieu qui lui faisait vivre une souffrance rédemptrice, osaient-ils dire.
Elle avait dû se rendre en Belgique pour pouvoir bénéficier d’« une mort la plus douce qui soit », que la France lui refusait.